Groupe ECHANGES
Intoduction de Pierre B.

Approche positive de l’existence : un sujet aux multiples facettes

Plan de l’exposé
1. Cadrer le problème
2. Exemples tirés de l’Histoire et de la Littérature
3. Mon expérience personnelle
4. Conclusions

1   Cadrer le problème
1-1 Interrogeons nous d’abord sur le sens des mots.  
L’adjectif « positif » est attesté dans la langue française depuis 1278. Il dérive du latin « positum » qui est le participe passé du verbe « ponere » signifiant placer, poser.
Le sens du mot positif a évolué dans notre langue, au début il pouvait signifier « qui a un caractère d’évidence », puis « qui résulte d’un acte volontaire » l’adverbe « positivement » signifiait « de manière certaine ». Au XVIIème siècle sont apparus les nombres positifs par opposition aux nombres négatifs. Au début du XIXeme siècle les Saint Simoniens et particulièrement Auguste Comte ont élargi le sens « philosophie positive » étant opposé à « métaphysique » ou « théologie ». Par extension, l’adjectif « positif » a pris le sens « qui a un caractère d’utilité pratique ».
Et pour en finir avec la sémantique, mentionnons le néologisme « positiver » d’apparition récente, mais très en vogue actuellement. Le Petit Robert en donne la définition suivante : «  présenter, envisager quelque chose sous un angle positif, constructif ; faire preuve d’optimisme ».

1-2 Le contexte
Nous devons donc préciser dans quel sens nous employons les mots : qu’est ce qu’une approche positive ? de quelle existence parlons nous ?
Examinons d’abord le contraire. Qu’est ce qu’une approche négative de l’existence, de mon existence ? Je pense que c’est celle qui accule au renoncement triste, à ce que les Pères de l’Eglise appelaient « acedia », un péché mortel, à ce qui accule au suicide, réel ou psychique évoqué dans la philosophie d’Albert Camus…

Nous dirons donc que ce qui est positif c’est le contraire de ce qui est négatif.
Par exemple, en géométrie sur l’axe des x, le positif est à droite, le négatif à gauche et par conséquent pour passer du négatif au positif il suffit d’aller de la gauche vers la droite. N’y voyez aucune allusion à la politique contemporaine.

Plus sérieusement disons que l’approche positive est associée à la créativité, à l’action, à aller de l’avant, à se tourner vers le futur, à rebondir après des échecs et des circonstances adverses, bref à entreprendre avec courage toute action qui perpétue la vie. Le dicton populaire le dit bien : « tant qu’il y a de la vie, il y a de l’espoir ».

Première remarque : le positif est  inséparable de l’espoir. C’est une vision volontariste, une vision qui cherche à influencer l’avenir.

Deuxième remarque : j’ai dit tout à l’heure que l’approche négative comprenait le renoncement triste. J’ai ajouté au mot renoncement l’adjectif triste, pour prendre en compte un renoncement pratiqué par certains individus et qui en tirent une approche positive de leur existence. Je pense aux moines boudhistes dont la gaité est ostensible, aux mystiques chrétiens ou musulmans, et à quiconque essaie de développer une spiritualité personnelle, qu’elle soit déiste, agnostique ou même athée. Tous ces individus renoncent volontairement à un certain nombre de comportements impulsifs, mais en tirent un paix intérieure qui se traduit souvent par une joie visible. Il existe de nombreux témoignages sur la façon dont ces individus sont parvenus à cette situation : certains par la méditation, d’autres par la prière intérieure, ou encore la pratique d’exercices spirituels et corporels en tous genre.

Vous connaissez mon approche personnelle de la question, approche qu’on pourrait qualifier de « positiviste » : Tous ces comportements, tous ces états d’âme, sont une affaire de neurotransmetteurs chimiques dans le cerveau des individus concernés. Certaines de ces molécules baptisées « endomorphines » engendrent les sensations de bien-être, les états de bonheur et finalement ne sont probablement pas étrangères à la notion « innée » que nous pouvons avoir du bien et du mal, et par voie de conséquence à la conscience de nos actes positifs, c’est à dire ceux qui tendent vers le bien plutôt que vers le mal.

Troisième remarque : le mot existence pose aussi des questions. De quelle existence voulons nous parler ? De la nôtre ? De celle de nos proches, de celle de nos amis ?
Pour cette existence individuelle,  une des rares certitudes est que notre existence en ce monde a une durée limitée, nous sommes nés et nous mourrons un jour… Certaines croyances posent que ce passage est ou sera prolongé par une « autre vie » au delà de la mort. D’autres posent même que ce passage a été précédé et sera suivi d’une infinité d’autres.
Ces croyances et attidudes philosophiques ont été largement véhiculées par les diverses religions
Celle que nous connaissons le moins mal, le Christianisme, en promettant le salut individuel, par opposition à d’autres eschatologies plus anciennes, a ouvert la voie à une façon originale d’eenvisager l’approche positive de l’existence individuelle.

Mais nous pouvons aussi rapporter le mot existence à l’humanité toute entière, c’est à dire aux 6,5 milliards d’individus qui peuplent la planète. On se rappelera que ce chiffre n’était que de 3 milliards au milieu du XXème siècle et qu’on nous promet 9 ou 10 milliards, on ne sait pas, avant le milieu du XXIème.

Nous pouvons aussi rapporter le mot existence, non plus à l’humanité actuelle observée sur cette période d’un siècle, mais à l’espèce humaine toute entière depuis le lointain homo sapiens jusqu’au futur homo cyberneticus s’il en advient un.

Enfin, et c’est là que nous rejoindrons certaines croyances asiatiques, nous pouvons rapporter le mot existence à l’ensemble du monde vivant. Au moins le monde animal, avec en premier les animaux de taille comparable à la  nôtre, mais aussi les insectes, les animaux de taille microscopique. Cela fait déjà beaucoup de monde. Mais, rapidement nous devrons adjoindre le monde végétal, puis le monde des bactéries, des microbes et de toutes sortes d’organismes. En effet, on commence à prendre conscience que la biosphère complète est un système en interaction permanente, et que la mondialisation de l’économie traditionnelle - mondialisation qui résulte de l’activité humaine - a atteint certaines limites dans ce système fermé.  
 
Dans la suite de cet exposé, je me limiterai  à ma propre existence  individuelle, à celle de mes proches et à celle de personnes connues. Je prendrai le mot positif au sens  « constructif, qui  fait preuve d’optimisme ».

2-Exemples tirés de l’Histoire et de la Littérature


On ignore que Marcel Aymé, l’auteur de nombreuses fables et contes moraux, « avait une santé fragile qui le contaignit à abandonner la préparation au concours  d’entrée à l’Ecole polytechnique, puis à Paris, des études de médecine… De cette convalescence forcée naquit le discret écrivain, l’inclassable auteur où le merveilleux,poétique et optimiste, s’immisce dans la triviale réalité décrite avec une ironie parfois cinglante. »
Qui ne reconnaitrait là l’effet d’une approche positive de l’existence ?

Dans un registre totalement différent, la lecture des « cartas de relaciones » correspondance que Hernan Cortez écrivit au roi d’Espagne pour lui faire part des heurs et malheurs de la conquète du Mexique, montre que face à l’adversité, à la révolte de ses troupes, à la maladie, aux trahisons des uns et des autres, aux revers de la guerre, une âme bien trempée conserve une approche positive de l’existence et que cela paye à court terme.

3 - Mon expérience personnelle

Je la tirerai essentiellement de ma vie professionnelle.

A diverses reprises, il m’est arrivé de faire des erreurs et d’être sur le moment complètement abattu, déprimé etc. Ayant constaté qu’en laissant passer  quelques jours ou quelques semaines, les conséquences n’étaient pas toujours catastophiques, et même parfois nulles, j’ai pris l’habitude de prendre patience et d’attendre que les choses suivent leur cours. Bien sûr il s’agit d’erreurs finalement mineures : erreurs de calcul, erreurs de conclusions dans une étude, erreurs de diagnostic dans une décision commerciale. Une erreur qui conduirait à un accident mortel du travail aurait de toutes autres conséquences, tant psychologiques que pénales. Heureusement, je n’ai pas été confronté à ces circonstances.

Vice versa, ce que l’on croit avoir particulièrement réussi, qui a été reconnu comme tel à court terme par votre entourage, peut être critiqué dix ou trente ans après.

J’ai en tête les études que j’ai faites pour « la reconversion de l’usine de Saint Auban ». Ayant comparé plusieurs solutions y compris l’arrêt de certains ateliers, j’ai préconisé de tirer un pipe-line d’éthylène depuis Lavéra jusqu’à saint Auban et de construire un nouvel atelier de chlorure de vinyle par un nouveau procédé. Cette solution a fonctionné moins d’une dizaine d’années, puis s’est révélée inadaptée et il a fallu  construire un nouvel ensemble à Lavéra et passer plus ou moins par zéro le fruit de mes recommandations y compris le pipe-line de 140 Km. Je crois même que cinquante ans après,  le polychlorure de vinyle est une matière plastique en perte de vitesse et que la plupart des installations de Lavéra sont arrêtées.
    
J’ai aussi en tête la construction de la première station  de traitement des effluents à La Rochelle qui traitait un minerai de terres rares contenant du thorium, un élément radioactif naturel. Cette réalisation fut considérée à l’époque comme un grand progrès en lieu et place du rejet direct à un tout à l’égoût en mer qui fonctionnait depuis 20 ans. Trente ans après, ces actions qui étaient positives à l’époque sont apparues comme inacceptables et l’usine a du changer sa source de matières premières et passer sur des concentrés américains et chinois sans thorium.

Ceci illustre pourquoi dans la vie professionnelle il faut savoir prendre du recul par rapport au court terme, et parfois même au long terme. Le décideur qui saurait mesurer à l’avance toutes les conséquences de ses actes, serait acculé à l’inaction.

Je voudrais maintenant faire le parallèle avec ce que j’ai pu observer de décideurs à un niveau très supérieur au mien, je pense à MM Gandois, Le Floch Prigent, Fourtou, Tirouflet et quelques autres.

Tant qu’ils sont au pouvoir, tout va bien. Leur rôle est de donner les grandes orientations et ils le font : Gandois pour assainir le textile comme il avait assaini la sidérurgie, Le Floch pour assurer en douceur la fin de la liquidation du textile et se débarrasser de la pétrochimie, Fourtou pour se débarasser de la chimie puis de l’agrochimie et ne garder que la pharmacie…
Dès qu’ils ont quitté le pouvoir, leur successeur passe des provisions financières pour ne pas se voir imputer les conséquences du règne précédent.
Le successeur du successeur ( J-P Clamadieu) fait des procès car il estime que la rétrocession des provisions pour régime de retraites spéciaux ou pour dépollution des sols a été très insuffisante.
Bref toute action positive a aussi sa face négative. Toute chose humaine est ambiguë. C’est une question de temps et d’espace de référence.

4 - Conclusions

Au niveau de l’individu, les exemples de tiers comme notre propre expérience montrent qu’il est utile d’avoir une approche positive de l’existence pour deux raisons principales qui tiennent un peu du pari de Pascal :

Nous nous appliquerons donc, en suivant saint Paul, "à transformer nos souffrances en patience et notre colère en espérance".