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(Echanges. Contribution JF C. janvier 2008)

Economie de Berlin
un aperçu




1. Finances de la Ville.

◊ Situation budgétaire.

Berlin se trouve dans une situation budgétaire extrêmement critique, qui continue à s’aggraver.
Le budget de la Ville est en effet en déficit depuis sa réunification, au point que sa dette a quintuplé depuis celle-ci, atteignant aujourd’hui quelque chose comme 60 milliards d’Euros.
Pour illustrer les choses :
- En 2006, les recettes ont été de 17 milliards d’Euros, les dépenses de 22 Milliards (intérêts de la dette compris) : la dette a augmenté de 3,1 Milliards.
- En 2007, le budget devait être équilibré, mais hors remboursement de la dette et paiement de ses intérêts, soit 17,5 milliards d’Euros. Mais en tenant compte de la dette, qui est une réalité, les dépenses devraient être de l’ordre de 20 Milliards d’Euros, ce qui fait que là encore le déficit ne pouvait que s’aggraver.

◊ Pourquoi cette situation ?

Il y a trois raisons principales à considérer :
- La première est la très grande étendue de la Ville, dont les infrastructures, considérables de ce fait, sont excessives par rapport à l’activité économique qui s’y développe.
- La seconde, sans doute la plus considérable, est le poids de l’histoire dans les trente dernières années.
- La troisième est, peut-on penser, une certaine insuffisance politique de ses dirigeants.
Il n’y a pas grand-chose à dire sur la première raison : la Ville est ce qu’elle est.
Il est intéressant en revanche de se poser sur les deux autres :

- Le poids de l’histoire :

* Avant la seconde guerre mondiale, capitale de l’Allemagne, Berlin était le premier centre industriel du                   pays. Après 1945 les données économiques sont toute autres, le gros des unités de production industrielles, en grande partie ruinées, étant appelé à déménager. Pour ne parler que des plus importantes de ces unités, Siemens s’en va à Munich, les banques s’établissent à Francfort, les constructeurs automobiles se déplacent vers la Bavière.
* Après 1945, la Ville se reconstruit, grâce aux subventions massives qu’elle reçoit de l’Est et de l’Ouest. Désormais sans industries significatives, elle devient une vitrine des deux blocs : trois universités, quatre orchestres, trois opéras s’affrontent symboliquement et à grand prix.
* Avec la chute du mur c’est la catastrophe : l’Etat fédéral coupe franchement dans les subventions qu’il versait à la Ville et aux entreprises de Berlin-Ouest (il faut savoir qu’avant 1989 le Sénat de Berlin-Ouest ne subvenait qu’au quart des dépenses de la cité), tandis que le secteur industriel de Berlin-Est ne résiste pas au passage à l’économie de marché et s’effondre.
* Ajoutons pour terminer que la Ville réunifiée doit faire avec un secteur-est dont les constructions et infrastructures sont généralement dans le pitoyable état que l’on rencontre partout aujourd’hui encore dans la plupart des pays de l’est, Russie comprise.

- Une certaine insuffisance politique.

Les problèmes considérables posés par la réunification tendaient à dépasser, on le conçoit aisément, les experts de la politique ordinaire. Comment faire face était la grande question : la monnaie, le marché, l’organisation économique et sociale, le droit, l’état civil, les transports, le travail, l’emploi … On n’a pas forcément su ce qu’il fallait faire, ni sans doute pu, mais peut-être aussi compris, quand la réalité, qui se charge en pareilles circonstances de poser concrètement les questions à voir, s’est manifestée. Ainsi en est-il par exemple du déficit : on ne peut entretenir un secteur public pléthorique (Berlin-Ouest plus Berlin-Est), quand on hérite subitement de charges nouvelles considérables, sans disposer des recettes nécessaires correspondantes. Or c’est ce qui s’est fait : on a conservé le même effectif ou à peu près jusqu’en 2001. Depuis on a commencé à tailler dans le vif. D’abord l’horaire hebdomadaire des fonctionnaires est passé de 40 à 42 heures, sans augmentation de salaire, puis on s’est attaqué aux effectifs : de 207 000 à l’origine, ils étaient tombés à 132 000 en 2004 (ma donnée date malheureusement), le Sénat envisageant encore une suppression de 25 000 emplois.



2. Situation économique et avenir.

- Potentiel.

Heureusement pour elle, la Ville a été choisie pour redevenir la capitale du Bund, ce qui lui assure pour l’avenir un lot d’activités annexes important, un rayonnement certain, même s’il est en bonne part dépendant de l’ensemble du pays, une position favorable pour attirer des investisseurs.
De par sa situation géographique, des voies de communication routières, ferroviaires, aériennes et fluviales dont elle bénéficie, de l’importance et de la qualité de ses infrastructures, de la qualité de ses universités, Berlin a une position très favorable dans le développement des relations économiques qui s’instaurent avec les pays de l’Europe Centrale et Orientale.
Viennent s’ajouter d’autres facteurs de notable importance, liés au site, tels qu’un fort potentiel de main d’œuvre hautement qualifiée, une vaste offre de terrains immédiatement disponibles, un parc immobilier facilement et économiquement accessible et une rare qualité de vie.
La Ville a donc en main pas mal d’atouts.

- Economie.

La perte des emplois engendrés par la construction du ‘mur’ en 1961 a été en partie compensée par l’installation d’administrations fédérales et l’accueil de manifestations internationales. La politique des années 80 tendait à faire de Berlin un centre technologique de pointe : microélectronique, informatique, biotechnologie …, un essor initié grâce à l’aide financière massive de la RFA et à l’appel de main-d’œuvre étrangère.
Actuellement, en termes de chiffre d’affaires, les principaux secteurs d’activité de la Ville sont l’industrie agro alimentaire et le tabac, tandis que, en termes d’emploi, les principaux secteurs sont la chimie, la mécanique de précision et l’électrotechnique.
Au moment de la réunification, Berlin-Est, qui était la capitale industrielle de la RDA, comptait 18 combinats. La plupart se sont avérés obsolètes, économiquement en faillite, perdant leur clientèle soviétique habituelle, inattendues à l’Ouest et inadaptées à son marché. Un redressement économique a été recherché, qui a été puissamment soutenu par les länder de l’Ouest, qui y ont investi chaque année, des années de rang, une moyenne de 35 milliards d’Euros. Les premiers investissements ont servi à remettre à niveau les infrastructures : réseaux routier et ferroviaire, canalisations d’eau et d’électricité… Par la suite, les équipements collectifs (hôpitaux, écoles, administrations, universités) ont été rénovés ou étendus. Cet effort massif ne pouvant être financé par les seules subventions et hausses d’impôts, s’est traduit parallèlement par un relèvement des taux d’emprunt, la fermeture d’équipements culturels, le report d’investissements et nombre de suppressions d’emplois.
Aujourd’hui, le tissu économique, un tissu dense de PME et de nombreuses entreprises artisanales, forment un fond d’activités particulièrement riche, dans lequel le secteur du BTP, florissant, occupe une place de choix. En même temps, le retour des sièges sociaux de grands Groupes allemands (Daimler Chrysler, ABB, Deutsche Bahn, Siemens …) tend à réinstaller Berlin dans son statut de capitale économique. Des firmes étrangères contribuent également par leur implantation à cet essor – Sony, Coca Cola, Samsung, IBM …, groupés pour la plupart dans le centre moderne de la Potsdamer Platz.

- Politique actuelle.

En dehors de l’incontournable équilibre des comptes, qui demeure une préoccupation majeure des élus, ceux-ci font tout pour encourager les implantations et créations d’entreprises et valoriser l’héritage du passé, lorsque, coupée en deux, la Ville se voulait de part et d’autre une vitrine, investissant dans les universités, la recherche et la haute technologie. Les moyens de jadis demeurent qui, bien exploités, devraient être un appui solide pour l’innovation. Les secteurs apparemment porteurs en la matière, qu’il n’appartient pas à la Ville de définir mais de reconnaître et appuyer, sont spécialement l’électrotechnique, l’informatique, les technique médicales, la biotechnologie, les énergies renouvelables et la production cinématographique.

En bref et pour conclure, on retiendra que la Ville ne manque ni d’avantages, ni de volonté, ni de dynamisme, de ce qu’il faut pour assurer son avenir. Mais qu’elle doit faire face à des difficultés extrêmement sérieuses, à savoir une situation financière très préoccupante, sa dépendance persistante des aides du Bund et, semble-t-il, une sensibilité particulière au contexte économique international, dont on sait combien il est aujourd’hui vacillant.





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